Identification

Numero CAS

51146-55-5

Nom scientifique (FR)

2-Hydroxy-Ibuprofène

Nom scientifique (EN)

2-[4-(2-hydroxy-2-methylpropyl)phenyl]propanoic acid

Autres dénominations scientifiques (Autre langues)

2-hydroxyibuprofen ; 2-[4-(2-hydroxy-2-methylpropyl)phenyl]propanoic acid ; benzeneacetic acid, 4-(2-hydroxy-2-methylpropyl)-alpha-methyl- ; rac 2-hydroxy ibuprofen ; 2-[4- phenyl]propionicacid ; 2-[4-(2-hydroxy-2-methyl-propyl)phenyl]propanoic acid ; 2,4'-(2-hydroxy-2-methylpropyl)phenylpropionic acid ; ibuprofen oh ; 2-[4-(2-hydroxy-2-methylpropyl)phenyl]propionic acid ; 4-(2-hydroxy-2-methylpropyl)-a-methyl-benzeneacetic acid ; 2,4?-(2-hydroxy-2-methylpropyl)phenylpropionic acid ; hydroxyibuprofen ; 2-(4-(2-hydroxy-2-methylpropyl)phenyl)propanoic acid ; 2-[4-(2-hydroxy-2-methylpropyl)phenyl]propanoic acid (2-hydroxyibuprofen)

Code EC

-

Code SANDRE

-

Numéro CIPAC

-

Formule chimique brute

\(\ce{ C13H18O3 }\)

Code InChlKey

UJHKVYPPCJBOSG-UHFFFAOYSA-N

Code SMILES

CC(C(O)=O)c1ccc(CC(C)(C)O)cc1

Tableaux de synthèse

Généralités

Généralités
CAS 51146-55-5
Substance prioritaire dans le domaine de l’eau (DCE) non
Substance soumise à autorisation dans Reach non
Substance soumise à restriction dans Reach non
Substance extrêmement préoccupante (SVHC) non
Réglementations

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Les principaux textes réglementaires concernant l'ibuprofène sont présentés ci-après.

  • Conditions d'autorisation de mise sur le marché des produits pharmaceutiques

Les principaux textes réglementaires concernant les conditions d'autorisation de mise sur le marché des produits pharmaceutiques à usage humain et à usage vétérinaire sont :

  • Le règlement CE n°726/2004 du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 établissant des procédures communautaires pour l'autorisation et la surveillance en ce qui concerne les médicaments à usage humain et à usage vétérinaire et qui institue l'Agence Européenne des Médicaments (EMEA). A noter que le dernier acte modificatif est le règlement CE n°470/2009 du Parlement européen et du conseil du 6 mai 2009 établissant des procédures communautaires pour la fixation des limites de résidus des substances pharmacologiquement actives dans les aliments d'origine animale ;
  • Les directives 2001/83/CE et 2001/82/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant respectivement un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain et aux médicaments à usage vétérinaire. Ces directives ont été modifiées par la directive 2009/53/CE du Parlement européen et du conseil du 18 juin 2009 en ce qui concerne les modifications des termes d'une autorisation de mise sur le marché de médicaments.

[3] Qualifie un comprimé qui se désagrège dans la bouche au contact de la salive. Il peut également être dispersé dans un verre d'eau avant ingestion.

Selon les deux directives 2001/83/CE et 2001/82/CE, une évaluation du risque environnemental est nécessaire pour toutes les demandes d'autorisation de mise sur le marché pour les médicaments à usage humain et vétérinaire. Une procédure d'évaluation du risque environnemental a été développée par l'Agence Européenne des Médicaments pour les nouveaux médicaments mis sur le marché communautaire. Il existe deux guides d'application pour les pharmaceutiques : un à usage humain4 (prenant effet au 1er décembre 2006) et un usage vétérinaire5 (prenant effet au 1er décembre 2007 et révisé au 1er mars 2009).

Ces textes considèrent les risques pour l'environnement associés à l'utilisation, le stockage et le rejet des médicaments. Soulignons que les risques associés à leur production ne sont pas mentionnés. De plus, le champ de cette directive ne concerne que les nouveaux médicaments ainsi que ceux concernés par une modification d'importance majeure (Bouvier et al., 2010). Selon la directive 2003/4 du 28 janvier 2003 concernant l'accès du public à l'information en matière d'environnement, il est donc possible d'accéder à une partie de cette évaluation (dans la limite du secret industriel et commercial). Bouvier et al. (2010) répertorient, dans l'annexe 11 de leur rapport, les médicaments présentant un chapitre Ecotoxicité/évaluation du risque environnemental sur le site de l'EMA. L'ibuprofène ne fait pas partie de ces derniers.

Ces directives spécifient également que, au cas par cas, des mesures appropriées seront prises pour limiter l'impact environnemental de ces substances. Il est également précisé que, par contre, cet impact ne devrait en aucun cas être un critère d'interdiction à la mise sur le marché de ces substances.

Concernant les activités de production, les dispositions du Règlement CE n°1907/2006 REACH ne sont pas applicables aux substances utilisées dans les médicaments à usage humain et vétérinaire excepté pour les titres suivants :

  • Titre III concernant les échanges des données et prévention des essais inutiles ;
  • Titre IV concernant l'information à l'intérieur de la chaîne d'approvisionnement ;
  • Titre VIII concernant les restrictions applicables à la fabrication, la mise sur le marché et l'utilisation de certaines substances et préparations dangereuses et de certains articles dangereux. A notre connaissance, aucune information n'est reportée concernant l'ibuprofène.

[4] http://www.ema.europa.eu/docs/en_GB/document_library/Scientific_guideline/2009/10/WC500003978.pdf

[5] http://www.ema.europa.eu/docs/en_GB/document_library/Scientific_guideline/2009/10/WC500004386.pdf

Produits pharmaceutiques et Directive Cadre sur l'Eau

L'ibuprofène n'est pas mentionné dans la liste des substances prioritaires de la Directive Cadre sur l'Eau (Directive 2000/60 du 23 octobre 2000) et il n'a pas retenu en 2008 parmi les substances soumises à révision pour leur possible identification comme substance prioritaire ou comme substance dangereuse prioritaire (Annexe III – Directive 2008/105/EC du Parlement européen et du Conseil établissant des normes de qualité environnementale dans le domaine de l'eau). De la même façon, l'ibuprofène n'est pas mentionné dans l'arrêté du 08/07/10 établissant la liste des substances prioritaires et fixant les modalités et délais de réduction progressive et d'élimination des déversements, écoulements, rejets directs ou indirects respectivement des substances prioritaires et des substances dangereuses visées à l'article R. 212-9 du code de l'environnement.

La Commission Européenne, en janvier 2012, propose d'ajouter quinze substances chimiques à la liste des trente-trois polluants qui sont surveillés et contrôlés dans les eaux de surface de l'Union Européenne. Il s'agit d'une nouvelle mesure visant à améliorer la qualité des eaux des rivières, lacs et eaux côtières. Parmi ces quinze substances figurent des substances pharmaceutiques mais l'ibuprofène n'appartient à cette liste (Commission Européenne, 2012).

Concernant la réglementation des installations classées, l'industrie pharmaceutique est classée dans l'industrie des biens de consommation et regroupe 3 secteurs d'activité :

  • la fabrication de produits pharmaceutiques de base (244A) ;
  • la fabrication de médicaments (244C) ;
  • la fabrication d'autres produits pharmaceutiques (244D).

Les 2 derniers secteurs sont à l'usage de la médecine humaine et de la médecine vétérinaire.

Les eaux potables doivent répondre aux normes européennes transcrites en droit français dans le Code de la Santé Publique. Si les textes spécifient que l'eau de consommation humaine ne doit contenir aucun élément chimique ou microbiologique nuisible à la santé, aucun médicament ne figure dans la liste des paramètres à analyser (Académie de Pharmacie, 2008).

Enfin, l'ibuprofène n'appartient pas à la liste de micropolluants concernés par la circulaire du 29 septembre 2010 relative à la surveillance de la présence de micropolluants dans les eaux rejetées au milieu naturel par les stations de traitement des eaux usées.

L'Anses a établi une hiérarchisation, vis-à-vis des risques de présence dans l'eau potable, des résidus de médicaments d'intérêt pour l'analyse des ressources et des eaux traitées (AFSSA, 2008). Trois critères de hiérarchisation ont été sélectionnés : le tonnage, l'activité et l'affinité pour l'eau. Sur les 210 molécules listées initialement pour les médicaments humains, 41 molécules, 11 métabolites et la caféine ont été classées prioritaires. Ainsi, l'ibuprofène appartient à la liste des médicaments humains prioritaires à rechercher dans les eaux et l'hydroxy-ibuprofène et le carboxy-ibuprofène appartiennent à la liste des métabolites prioritaires. On notera que cette hiérarchisation a servi de base à une campagne nationale de mesures de 45 substances pharmaceutiques (voir paragraphe 4.2.1).

Besse et Garric (2008) ont publié également une méthodologie de priorisation, vis-à-vis des risques pour l'environnement, des produits pharmaceutiques basée sur trois étapes :

  • Une classification en classes d'exposition (6 classes) de 120 molécules et 30 métabolites basée sur l'utilisation des PEC (Predicted Environmental Concentration) ;
  • Une classification au cas par cas basée sur les données disponibles (données écotoxicologiques, pharmacologiques, physico-chimiques et mécanismes d'action) ;
  • Une priorisation parmi les molécules ayant des structures chimiques et des mécanismes d'action semblables.

Ils ont ainsi retenu 40 molécules-mères et 11 métabolites dont l'ibuprofène et deux de ses métabolites : hydroxy-ibuprofène et carboxy-ibuprofène.

Production et utilisation

Production et ventes

Données économiques

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En 2009, la France était parmi les principaux producteurs européens de médicaments, après l'Allemagne et la Suisse comme le montre la Figure 1 ci-après.

Figure 1. Production pharmaceutique en Europe : principaux pays producteurs européens en 2009 (en millions d'euros) (LEEM, 2011b).

Toutefois, nous n'avons pas identifié d'informations concernant une potentielle production française d'ibuprofène.

L'évolution des exportations et des importations françaises de médicaments est présentée sur la Figure 2 ci-après.

Figure 2. Evolution des exportations et des importations françaises de médicaments en millions d'euros (LEEM, 2011b).

Nous n'avons pas d'information sur l'évolution des exportations/importations pour l'ibuprofène.

La molécule a été découverte par la société Boots Pure Drug Company dans les années 1960 et cette société a breveté une synthèse qui a longtemps été la méthode de choix pour la production industrielle et qui nécessite 6 étapes (cf. Figure 3 ; Demirdjian, 2005) :

Figure 3. Synthèse de l'Ibuprofène par la Société Boots Pure Frug Company.

Dans les années 1990, la société BHC (actuellement BASF) a mis au point un procédé mettant en avant la sélectivité de la réaction, diminution des déchets (récupération et recyclage des déchets de sous-produit du processus de fabrication…). Cette synthèse est effectuée en 3 étapes (au lieu de 6 étapes pour le procédé précédemment employé) (cf. Figure 4 ; Demirdjian, 2005). Cette synthèse améliorée a remporté le « Presidential Green Chemistry Challenge » en 19976 .

[6] http://www.epa.gov/greenchemistry/pubs/pgcc/winners/gspa97.html

Figure 4. Synthèse de l'Ibuprofène selon BHC (actuellement BASF).

Lors de ce travail, nous n'avons pas identifié d'informations concernant la production française d'ibuprofène (vis-à-vis du nombre de sites en France et de la méthode employée pour la production).

Utilisations

SECTEURS D'UTILISATION

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La France était le quatrième consommateur mondial de médicaments après les Etats-Unis (197 802 millions de dollars), le Japon (56 675 millions de dollars) et l'Allemagne (27 668 millions de dollars) avec 25 630 millions de dollars en 2006 (Académie de Pharmacie, 2008). En 2009, la France avec l'Allemagne est devenue le premier consommateur de médicaments au sein de l'Union Européenne aussi bien de médicaments à usage humain que de médicaments à usage vétérinaire (Bouvier et al., 2010). Concernant le marché des médicaments vétérinaires en Union Européenne, cela peut s'expliquer par l'importance de l'élevage français, tous cheptels confondus.

A défaut d'informations concernant les tonnages de médicament consommés en France, l'évolution du chiffre d'affaires en médicaments est présentée sur la Figure 5 ci-après.

Figure 5 : Evolution du chiffre d'affaires 5 (CA) concernant les médicaments (prix fabricant HT, millions d'euros) d'après LEEM, 2011b.

On constate ainsi une augmentation constante du chiffre d'affaires depuis 1990 pour atteindre 51 471 millions d'euros en 2010.

L'évolution de la consommation de médicaments en France depuis 1990 par les ménages est présentée sur le Tableau 3 ci-après. Cette consommation est rapportée en nombre d'unité. Le nombre d'unités (une unité équivaut à une boîte ou un flacon ou un tube…) est un indicateur de l'évolution de la consommation dans la mesure où il y a peu de changements de conditionnement ou de dosage. Cependant, une forte pathologie hivernale augmente le nombre de petits conditionnements consommés par rapport à une année moyenne (c'est le contraire pour une faible pathologie saisonnière). Par ailleurs, le développement récent des conditionnements trimestriels diminue artificiellement la consommation en volume (LEEM, 2011b).

Tableau 3. Evolution de la consommation de médicaments en France par les ménages en nombre d'unité (LEEM, 2011b).

L'évolution du nombre d'unités de médicaments consommés en France ne suit pas de tendance nette depuis 2005. Celle-ci fluctue autour de + ou – 3 % environ.

L'évolution de la consommation des médicaments des ménages (en millions d'euros) est présentée dans le Tableau 4 ci-après.

Tableau 4. Evolution de la consommation des médicaments des ménages (y compris autres produits pharmaceutiques, produits sanguins, préparations magistrales, honoraires spéciaux du pharmacien d'officine mais hors médicaments hospitaliers) d'après LEEM (2010).

Rapportée à la population française, la consommation de médicaments et autres produits pharmaceutiques a été en moyenne de 547 euros par habitant en 2009. Il s'agit d'une moyenne qui recouvre une très grande diversité puisque ce sont surtout les personnes âgées et celles atteintes de maladies graves qui consomment le plus.

Les médicaments à usage humain les plus prescrits en France sont des antalgiques à base de paracétamol et des anti-inflammatoires (Dulio et Morin, 2009).

En 1998, la consommation française d'ibuprofène était de 166 tonnes/an (Beausse, 2004). En 2005, 240 tonnes d'ibuprofène ont été vendues en France (Bouvier et al., 2010). Ce dernier faisait partie des 10 médicaments les plus vendus en France cette année-là.

Selon une autre source, Sadezky et al. (2008) et cohérentes avec les précédentes, la consommation moyenne annuelle française (calculée à partir des données de 1999 à 2006) d'ibuprofène est de 203 tonnes/an. Cela correspond à une consommation moyenne de 3,4 g d'ibuprofène par habitant et par an.

L'ibuprofène est principalement utilisé dans les médicaments à usage humain. Concernant les médicaments à usage vétérinaire, l'ibuprofène n'est que très peu utilisé en France. Une spécialité à destination des chiens et des chats est recensée dans le dictionnaire des Médicaments Vétérinaires7 . Celle-ci est proposée par un seul laboratoire en France (DOLOCANIL dont le laboratoire OMEGA PHARMA France est titulaire de l'autorisation de mise sur le marché). L'utilisation pour les chiens et chats est toutefois déconseillée par le « Merck Veterinary Manual » 8 (en raison de la toxicité potentielle pour ces animaux). D'une façon plus générale, les animaux sont extrêmement sensibles aux principes actifs des anti-inflammatoires non stéroïdiens humains. Une gamme spécifique d'anti-inflammatoire pour les animaux a été ainsi développée (Professeur Enriquez, 2011).

A notre connaissance, il n'existe aucun usage non médical d'ibuprofène.

[7] http://www.wk-vet.fr/mybdd/index.php

[8] http://www.merckvetmanual.com

Rejets dans l’environnement

Émissions atmosphériques

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  • Industrie du médicament

Il n'existe que très peu de données concernant les émissions vers le milieu naturel de composés pharmaceutiques par les usines de fabrication de ces produits. Il est généralement admis que les émissions de composés thérapeutiques sont proches de zéro dans le mode de fonctionnement normal des sites de fabrication, comme en témoignent les bonnes pratiques de fabrication et la régulation des émissions suivies par les industries pharmaceutiques, aussi bien au niveau des solvants que des résidus de composés (Velagaleti et al., 2002).

Lors de ce travail, nous n'avons pas identifié d'informations spécifiques concernant les rejets atmosphériques des usines de production d'ibuprofène. Néanmoins, celles-ci peuvent être considérées comme faibles voire négligeables.

Incinération des médicaments

Parmi les circuits de fin de vie de l'ibuprofène, seule l'incinération est susceptible d'émettre cette substance vers l'atmosphère. Il faut aussi tenir compte des produits formés lors de l'incinération des médicaments non utilisés. Compte tenu du fait que ces médicaments non utilisés (MNU) et les déchets médicamenteux hospitaliers sont incinérés dans des installations répondant aux normes environnementales les plus strictes, avec notamment des traitements de fumées, les rejets afférents devraient être a priori insignifiants (Académie de Pharmacie, 2008) et en particulier pour l'ibuprofène.

A noter que depuis le 1er janvier 2009, tous les médicaments collectés en pharmacie par l'association Cyclamed ne sont plus recyclés et redistribués mais incinérés.

Les rejets atmosphériques de médicaments concernent un nombre limité de molécules, mais essentiellement des anesthésiques volatils de type fluothane qui sont consommés en milieu hospitalier mais aussi des médicaments comme l'eucalyptol qui sont éliminés par voie pulmonaire (Académie de Pharmacie, 2008).

Concernant l'ibuprofène, les émissions dans l'air semblent très faibles (voir paragraphe 4.1.3).

Émissions vers les eaux

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Il n'existe que très peu de données concernant les émissions vers le milieu naturel de composés par les usines de fabrication des produits pharmaceutiques. Il est généralement admis que les émissions de composés thérapeutiques sont proches de zéro dans le mode de fonctionnement normal des sites de fabrication, comme en témoignent les dispositions drastiques concernant les bonnes pratiques de fabrication et la régulation des émissions produites par les industries pharmaceutiques, aussi bien au niveau des solvants que des résidus de composés (Velagaleti et al., 2002).

Dans la majorité des cas, les stations d'épuration constituent le premier réceptacle des rejets humains de substances pharmaceutiques. On y retrouve les rejets issus des agglomérations avec la consommation individuelle de chaque habitant, et les rejets plus spécifiques des structures hospitalières (Togola, 2006). Pour une utilisation « normale » de l'ibuprofène par le patient, 70 à 90 % de l'ibuprofène est récupérée dans l'urine (Davies, 1998).

Les apports urbains sont très variables, selon les modes de consommation voire par région (Bussi, 2000). D'autre part, selon les saisons, la consommation en substances pharmaceutiques, et donc les apports à la station vont varier (Castiglioni et al., 2005). Ainsi, concernant l'ibuprofène, les apports hivernaux sont de 122 mg.j-1our/1 000 habitants en Italie contre 20 mg.j-1our/1 000 habitants en été soit une différence de – 84 %.

Les flux émis par les hôpitaux peuvent être conséquents. Si on considère en moyenne que la consommation domestique d'eau est d'environ 100 litres/personne/jour (Halling-Sørensen et al., 1998), la consommation en milieu hospitalier est estimée à 750 litres/lit/jour en France (Emmanuel et al., 2005). Généralement, ces effluents hospitaliers subissent un premier traitement dans une station d'épuration interne au complexe, avant de rejoindre les réseaux urbains et les stations d'épuration classiques (Togola, 2006).

A ce jour, nous n'avons pas identifié d'informations spécifiques à l'ibuprofène.

Rejets dans l'environnement

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Il existe différentes voies de rejet des médicaments dans l'environnement (Dulio et Morin, 2009 ; Académie de Pharmacie, 2008) :

  • Les rejets lors des procédés industriels de fabrication des substances (source mineure) ;
  • Les rejets directs des médicaments non utilisés via les déchets ménagers ou via les réseaux d'assainissement (source non négligeable) ;
  • Les rejets par excrétion suite à l'utilisation par le patient (source principale de contamination) ;
  • Les rejets d'élevages d'animaux (ne concerne pas l'ibuprofène).

Ayscough et al. (2002) résument les différentes voies possibles d'émissions de substances pharmaceutiques dans l'environnement (voir Figure 6 ci-après).

STW : Sewage treatment works – Stations de traitement des eaux usées

Figure 6. Voies de contamination de l'environnement par les médicaments (Ayscough et al., 2002).

A partir de ces sources, les principales voies d'apport aux eaux de surface sont les effluents d'eaux usées municipales, le lessivage et le ruissellement des terres agricoles ainsi que les activités aquacoles (Pépin, 2006).

L'ibuprofène n'est pas présent naturellement dans l'environnement. Aucune émission non anthropique n'est observée.

Selon l'Académie de Pharmacie (2008), l'une des principales voies d'introduction des médicaments dans l'environnement est la dispersion des médicaments au travers des déchets ménagers.

En France, depuis 1995, une étude barométrique auprès du grand public est réalisée chaque année sur les comportements en matière de tri sélectif des MNU. L'étude est effectuée sur un panel de 1 000 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. En 2010, l'enquête confirme un niveau de tri élevé, puisque les ¾ des Français (74 %) déclarent déposer leurs Médicaments Non Utilisés chez le pharmacien. Ce chiffre est quasiment stable depuis dix ans (Cyclamed, 2010). En 2011, Cyclamed a fait réaliser une autre étude pour évaluer le « gisement » des médicaments non utilisés des médicaments français (Cyclamed, 2011). Cette enquête a permis d'évaluer un « gisement » en masse annuel de MNU des ménages français se situant entre 24 000 et 29 000 tonnes. Il en a été déduit que Cyclamed récupérait environ 50 % des MNU. On notera un certain écart entre les deux études. Néanmoins, comparativement au Royaume-Uni, une importante quantité des médicaments est envoyé en incinération et donc ne se retrouve pas dans les eaux de surface. Concernant l'ibuprofène, par un calcul « grossier » et en se basant sur une consommation de 203 tonnes/an, on peut estimer qu'entre 53 et 101,5 tonnes par an sont jetées dans les ordures ménagères ou dans les eaux usées.

Les pertes/fuites dans les réseaux d'assainissement, variant entre 5 et 25 %, peuvent également être à l'origine d'émissions de substances pharmaceutiques dans l'environnement. De plus, pendant des périodes de fortes pluies, si la capacité de traitement de la station d'épuration est dépassée, cela donne lieu à une émission incontrôlée de substances pharmaceutiques dans le milieu aquatique (Dulio et Morin, 2009 ; Académie de Pharmacie, 2008).

Les animaux d'élevage sont également une potentielle source d'émissions de substances pharmaceutiques dans l'environnement par l'excrétion de produits vétérinaires (notamment les antiparasitaires et les antibiotiques) (Togola et al., 2008). Néanmoins, comme nous l'avons vu précédemment, l'ibuprofène n'a, en France, qu'un emploi très restreint en médecine vétérinaire.

Les sols peuvent être également contaminés par l'épandage sur les champs des boues des stations d'épuration (Académie de Pharmacie, 2008). L'Académie nationale de Pharmacie a fait un calcul concernant ces rejets avec pour hypothèses que :

  • le rendement moyen d'élimination des médicaments est d'environ 60 % (via leur « capture » par les boues) ;
  • un quart de ces produits « capturés » est stocké (soit 15 % du total des médicaments introduits dans les stations d'épuration) ;
  • 50 % des boues de stations d'épuration font l'objet d'un épandage agricole.

La conclusion de ce calcul approximatif est qu'environ 7,5 % de tous les médicaments rejetés dans les eaux se retrouvent dans le milieu terrestre.

Sur cette base, on peut ainsi, toujours de manière grossière, évaluer la quantité d'ibuprofène émis dans le milieu terrestre via les boues d'épandage. Cette quantité serait de l'ordre de 4 à 7,6 tonnes par an pour une consommation de 203 tonnes/an.

Deux études ont estimé les facteurs d'émissions pour l'ibuprofène et cela, avant traitement en station d'épuration. Ces résultats, cohérents, sont présentés ci-après.

Kasprzyk-Hordern et al. (2009) ont estimé la consommation en différentes substances pharmaceutiques de communes du sud du Pays de Galle à partir des mesures réalisées au niveau de stations d'épuration et les données du National Health Service du Pays de Galles. Concernant l'ibuprofène, les valeurs varient entre 4,7 et 15,2 g.j-1our/1 000 habitants soit entre 1,71 et 5,55 g/an/hab.

Sadezky et al. (2008) rapportent une consommation moyenne en ibuprofène de 9,896 g/an/hab pour la France (valeurs estimées à partir des données recueillies entre 1999 et 2006).

Miege et al. (2009) ont conçu une base de données afin d'évaluer l'occurrence et l'efficacité d'élimination des composés pharmaceutiques et cosmétiques dans les stations d'épuration. Ils ont répertorié 6 641 données concernant 184 composés, issues de 117 publications scientifiques (cf. paragraphe Erreur ! Source du renvoi introuvable.). De cette base de données, des concentrations moyennes en ibuprofène en entrée et sortie des stations d'épuration (procédé à boues activées) ont été déterminées de 14,6 et 1,96 µg.L-1 respectivement soit un rendement moyen d'environ 87 %. En confrontant ce rendement d'élimination avec les facteurs d'émissions avant traitement présentés ci-dessus, on peut calculer, de façon grossière, des facteurs d'émissions après traitement (par boues activées) en station d'épuration :

  • 0,22 à 0,72 g/an/hab (pour les valeurs évaluées au Pays de Galle) ;
  • 1,29 g/an/hab (pour la France).

Dans le rapport de l'AFSSA daté de juin 2010, l'annexe II présente, de façon générale, les différents processus influençant le comportement des résidus de médicaments dans l'environnement (AFSSA, 2010) sans précision spécifique par rapport à l'ibuprofène.

Présence environnementale

Atmosphère

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Comme nous l'avons vu précédemment, les rejets médicamenteux vers l'atmosphère sont faibles (Académie de Pharmacie, 2008). La tension de vapeur et la constante d'Henry de l'ibuprofène, respectivement de 2,48.10-2 Pa et 1,5.10-7 atm/m3/mole, indiquent qu'il est très peu volatil et peu enclin à se diffuser vers l'air à partir des milieux terrestres et aquatiques (US EPA, 2000 cité par Pépin, 2006).

Dans l'atmosphère, le comportement des médicaments, comme pour la plupart des molécules organiques, va être principalement contrôlé par les réactions avec les radicaux hydroxyles (OH) en influençant leur temps de résidence dans la troposphère (US EPA, 2000 cité par Pépin, 2006). De plus, selon cette même source, la photolyse directe, les réactions avec les radicaux nitrates et avec l'ozone contribuent à leur élimination de l'atmosphère.

Le temps de demi-vie de l'ibuprofène dans l'atmosphère est estimé à 10,8 heures (US EPA, 2000 cité par Pépin, 2006). Le transport atmosphérique de l'ibuprofène semble être assez limité.

[12] Le facteur de retard exprime le retard d'un contaminant pendant son transport dans l'eau dû à son adsorption sur la matière organique du sol.

Lors de ce travail, nous n'avons pas identifié d'informations spécifiques sur les concentrations en ibuprofène dans l'atmosphère.

Aquatique

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Dans le milieu aquatique, le devenir des médicaments est fonction de leurs propriétés physico-chimiques et des conditions du milieu. Les facteurs physiques et chimiques locaux tels que le pH, la température, la dureté, la concentration en matières en suspension et le potentiel d'oxydoréduction expliquent en grande partie le comportement environnemental des médicaments dans l'eau (Pépin, 2006).

L'ibuprofène se caractérise par une solubilité dans l'eau de 21 mg.L-1 et un coefficient de partage octanol-eau élevé (log Koe9 = 3,97), ce qui indique que cette substance est lipophile. L'ibuprofène est donc à considérer comme peu bioaccumulable10 . Les substances hydrophobes ont généralement une affinité pour les matières en suspension (MES) présentes dans la colonne d'eau (Beausse, 2004).

L'ibuprofène fait partie de la famille des acides carboxyliques et possède une constante pKa de 4,91, ce qui explique sa présence sous forme d'ions négativement chargés dans les eaux au pH supérieur à 5.

Adsorption

Malgré son potentiel d'adsorption aux particules solides (Kd de 453,79), la propriété acide de l'ibuprofène limite grandement son adsorption aux matières en suspension dans les eaux naturelles (Fent et al., 2006 ; Scheytt et al., 2005).Ainsi, l'adsorption joue un rôle mineur dans l'élimination de l'ibuprofène dans les eaux naturelles (Fent et al., 2006).

[9] log Koe = log Kow (notation respectivement française et anglaise)

[10] L'ibuprofène a par ailleurs un score PBT faible de 2/9 sur le site www.janusinfo.se

Hydrolyse

Comme les produits pharmaceutiques sont principalement fabriqués pour être absorbés par voie orale, ils sont conçus de façon à être insensibles aux réactions chimiques comme l'hydrolyse (Andreozzi et al., 2003).

Biodégradation aérobie et anaérobie

Plusieurs études ont montré que la biodégradation aérobie et anaérobie par des microorganismes constitue le principal processus d'élimination de cette substance dans le milieu aquatique (Fent et al., 2006 ; Buser et al., 1999 ; Winkler et al., 2001 ; Zuccato et al., 2005). Ces études ont également mis en évidence que les processus abiotiques de dégradation (photodégradation, photolyse, hydrolyse, etc.) contribuaient peu à l'élimination de l'ibuprofène dans la colonne d'eau.

Demi-vie de l'ibuprofène dans l'eau

La demi-vie de l'ibuprofène dans l'eau varie fortement en fonction des conditions du milieu. Les études menées à ce sujet rapportent des demi-vies d'un jour (Ashton et al., 2004 ; Zuccato et al., 2005), de 15 à 20 jours (Buser et al., 1999 ; US EPA, 2000 cité par Pépin, 2006 ; Halling-Sørensen et al., 1998) et de 50 jours (Ashton et al., 2004). La variabilité du pH, de l'oxygène dissous et des matières en suspension sont à l'origine de ces disparités.

Un recensement non exhaustif de différentes études de la littérature est présenté ci-après et organisé suivant le type de milieu aquatique (eau de surface, souterraine, boissons…). Un tableau de synthèse est présenté à la fin de ce paragraphe.

  • Dans les eaux de surface

Les résultats de l'étude de Budzinski et Togola (2006) réalisée entre mars 2002 et juin 2005 dans différents estuaires français et concernant l'ibuprofène sont présentés dans le Tableau 5 ci-après :

Tableau 5. Concentrations extrêmes (ng.L-1) mesurées dans les différents estuaires en France (Budzinski et Togola, 2006).

LD : Limite de Détection

Togola et Budzinski (2008) ont également mis en évidence une contamination des eaux de surface de l'Hérault par, entre autre, l'iburpofène avec des concentrations comprises entre inférieure à la limite de détection et 4,5 ng.L-1.

L'Agence de l'Eau Loire-Bretagne a réalisé quatre campagnes de mesure en 2007 en sélectionnant 7 eaux de surface, 3 estuaires et 2 eaux souterraines. L'ibuprofène et un de ses métabolites le 2-hydroxy-ibuprofène font partie des substances les plus fréquemment détectées (Dulio et Morin, 2009).

Une campagne de mesure exploratoire a été menée par l'Agence de l'Eau Artois-Picardie (2010) dans le but de dresser une image ponctuelle de la présence des substances médicamenteuses dans les eaux de surface du bassin Artois-Picardie. Les prélèvements ont été effectués en juin 2010 sur des milieux soumis à de faibles pressions anthropiques ainsi que sur des milieux où les pressions sont identifiées. Au total, 38 sites ont été sélectionnés et 54 substances analysées (dont l'ibuprofène), à usage humain et/ou vétérinaire, représentant différentes classes thérapeutiques. Les résultats ont mis en évidence la présence de 8 substances médicamenteuses appartenant à 6 classes thérapeutiques différentes, sur un total de 20 stations. L'ibuprofène n'a pas été quantifié lors de cette campagne. Néanmoins, dans le rapport de l'Agence de l'Eau Artois-Picardie, il est bien spécifié que les résultats sont à nuancer : les limites de quantification des laboratoires sont trop élevées par rapport aux niveaux de concentrations des substances médicamenteuses habituellement retrouvées dans les eaux de surface. C'est le cas pour l'ibuprofène qui n'a pas été quantifié pendant cette campagne d'analyse. La limite de quantification de ce composé est établie à 0,5 µg.L-1 alors que les concentrations généralement retrouvées dans les eaux de surface sont de l'ordre de 0,1 µg.L-1.

Dans le cadre de la campagne de surveillance organisée par le Joint Research Centre, plus de 100 rivières des 27 pays européens ont été échantillonnés afin d'évaluer l'occurrence des polluants organiques polaires persistants en Europe. 35 composés ont été sélectionnés et analysés dont des substances pharmaceutiques (Loos et al., 2009). Pour l'ensemble de ces pays, la fréquence de détection de l'ibuprofène était de 62 %, la concentration moyenne de 395 ng.L-1 et médiane de 6 ng.L-1 et une concentration maximale de 31 323 ng.L-1 (maximum mesuré en Turquie) et une limite de détection de 1 ng.L-1.

Dans le cadre du programme européen KNAPPE (Knowledge and Need Assessment on Pharmaceutical Products in Environmental waters) dont l'objectif est de définir l'état de l'art sur les produits pharmaceutiques à usage humain dans les milieux aquatiques, des mesures de substances pharmaceutiques ont été réalisées en Europe. Les principaux résultats pour les concentrations mesurées dans les eaux de surface en ibuprofène et ses métabolites sont présentés dans le Tableau 6 ci-dessous (Sadezky et al., 2008) :

Tableau 6. Concentrations en ibuprofène et ses métabolites mesurées dans le cadre du programme KNAPPE – eaux de surface et souterraine (Sadezky et al., 2008).

LD : limite de détection

L'Agence de l'eau Seine Normandie a ciblé des sites destinés à la production d'eau pour consommation humaine -nappes souterraines peu profondes non captives, sources et forages (certains karstiques) -caractérisés par un environnement de surface représentatif d'une pression homogène (ex. élevage, industrie, domestique, etc.). Quatre campagnes de mesure ont été réalisées entre 2006 et 2008. Sur chacun des 151 échantillons prélevés, 30 molécules médicamenteuses ou dérivés, appartenant à 8 classes thérapeutiques particulièrement utilisées et dotées d'une certaine persistance dans l'environnement ont été recherchées, y compris des métabolites (Tracol et Duchemin, 2009). L'ibuprofène ainsi que deux de ces métabolites faisaient partie des molécules médicamenteuses recherchées lors de ces campagnes de mesure. 10 molécules n'ont jamais été retrouvées dans les eaux brutes ou traitées, dont l'ibuprofène. Néanmoins, un des deux métabolites de cette molécule, 1-hydroxy-ibuprofène, a été détecté dans les eaux souterraines à une concentration inférieure à 10 ng.L-1 (limite de quantification de l'ordre du ng.L-1).

Dans les eaux souterraines

Les eaux souterraines n'englobent pas que les nappes phréatiques. Elles représentent un ensemble assez hétérogène dont la vulnérabilité est très variable selon la profondeur, la nature des terrains et la protection géologique (Académie de Pharmacie, 2008). Les écarts de concentration suivants ont été observés pour de nombreux médicaments à Berlin (mesures réalisées entre le mois de mai et celui de décembre 1999) par Heberer (2002). Concernant l'ibuprofène, la gamme de concentrations s'étend de la limite de détection à 200 ng.L-1.

Dans les eaux de boisson

Une étude sur les résidus médicamenteux dans les eaux de consommation a été confiée à l'Anses par la Direction générale de la santé afin d'estimer l'occurrence de ces résidus par une campagne nationale de prélèvements et d'analyses (Anses, 2011). Une campagne nationale de mesures de 45 substances pharmaceutiques d'origine humaine, vétérinaire ou de leurs métabolites a été lancée sur la base d'une liste établie par l'Anses et l'Afssaps13 . La stratégie de sélection des sites de prélèvements a permis de couvrir près d'un quart de la population en France métropolitaine et dans les DOM. Tous les départements ont pu être investigués. Les prélèvements ont été effectués sur des ressources utilisées pour la production d'eau destinée à la consommation humaine (eau de surface et eau souterraine) et sur des eaux traitées, en sortie de station de potabilisation.

[13] AFSSA (2008). Hiérarchisation des résidus de médicaments d'intérêt pour l'analyse des ressources et des eaux traitées.

Concernant l'ibuprofène, une concentration maximale de 19 ng.L-1 a été mesurée dans les eaux brutes avec une fréquence de détection de 2,5 % et une fréquence de résultats quantifiables de 1,1 %. Dans les eaux traitées, la fréquence de détection de l'ibuprofène est de 1,4 %.

On notera que l'hydroxy-ibuprofène, métabolite de l'ibuprofène, fait partie des molécules les plus fréquemment retrouvées dans les eaux traitées et en particulier pour celles d'origine superficielle (fréquence de détection dans les eaux traitées de 5,8 % et une teneur maximale de 85 ng.L-1).

Les principaux résultats de l'étude (Anses, 2011) sont les suivants :

  • pour environ 75 % des échantillons d'eau traitée qu'elles soient d'origine souterraine ou superficielle, aucune des 45 molécules n'a été quantifiée (hors caféine qui est par ailleurs un marqueur de l'activité humaine) ;
  • pour les 25 % d'échantillons positifs, les analyses révèlent généralement la présence simultanée d'une à quatre molécules ;
  • parmi les 45 molécules recherchées, 26 n'ont jamais été retrouvées. Dix-neuf ont été détectées au moins 1 fois, parmi lesquelles 5 étaient présentes à des concentrations trop faibles pour pouvoir être quantifiées ;
  • hormis la caféine, les molécules les plus fréquemment retrouvées sont, selon un ordre décroissant, la carbamazépine (anti-épileptique) et son principal métabolite (10-11 époxycarbamazépine) ainsi que l'oxazépam (anxiolytique) qui est à la fois une molécule mère et un métabolite de benzodiazépines et l'hydroxy-ibuprofène, métabolite de l'ibuprofène (la fréquence de détection de l'ibuprofène dans les eaux traitées est quasiment nulle) ;
  • plus de 90 % des échantillons présentent une concentration maximale cumulée inférieure à 25 ng.L-1 et moins de 5 % des échantillons présentent une concentration maximale cumulée supérieure à 100 ng.L-1 ;
  • la comparaison entre les eaux traitées et les eaux brutes montre un bon abattement (60 %) obtenu par désinfection (chlore) et une efficacité de l'ordre de 75 à 80 % pour les filières de filtration et les traitements poussés.

Jones et al. (2005) ont fait une revue des contaminations des eaux de boisson à travers le monde. L'ibuprofène est parmi les composés présents avec une concentration maximale de 3 ng.L-1 mesurée en Allemagne.

Dans les stations d'épuration

Ca paragraphe traite des différents niveaux de concentrations en ibuprofène mesurées dans les eaux brutes et effluents de stations d'épuration afin d'évaluer la présence de cette substance dans le milieu aquatique. L'efficacité des différents types de traitement en station d'épuration est explicitée dans la dernière partie de cette fiche technico-économique, partie relative aux traitements des rejets en ibuprofène (voir paragraphe 5.1).

Dans le cadre du programme KNAPPE, les concentrations mesurées en station d'épuration pour l'ibuprofène sont présentées dans le Tableau 7 ci-après (Sadezky et al., 2008).

Tableau 7. Concentrations en ibuprofène et ses métabolites mesurées dans le cadre du programme KNAPPE – stations d'épuration (Sadezky et al., 2008).

Le projet Ampères a pour objectifs de mesurer la composition en micropolluants des eaux usées et traitées et de quantifier l'efficacité d'élimination de différentes filières d'épuration vis-à-vis de ces contaminants (boues activées, biofiltration, filtres plantés de roseaux, bioréacteurs à membranes immergées, traitement tertiaire oxydant ou filtrant).

Dans ce cadre, 33 substances pharmaceutiques (dont l'ibuprofène) et 5 hormones ont été choisies en tant que substances cibles à retenir dans le projet.

Soulier et al. (2011) ont montré que les anti-inflammatoires sont quantifiés entre 80 à 97 % des échantillons dans les eaux brutes, entre 80 et 100 % dans les eaux traitées secondaires et sont légèrement moins souvent quantifiés dans les eaux traitées tertiaires (de 50 à 81 %). Concernant l'ibuprofène, il est quantifié dans plus de 90 % des échantillons d'eaux brutes, 100 % des échantillons dans les eaux traitées secondaires et environ dans 65 % des échantillons d'eaux traitées tertiaires.

En entrée de station d'épuration, l'ibuprofène appartient au groupe de substances, quantifié dans des gammes de concentrations allant du centième de µg.L-1 à la dizaine de µg.L-1 (11 μg.L-1 en entrée de station). En aval de traitement secondaire, l'ibuprofène appartient au groupe de substances quantifiées dans des gammes de concentrations allant de quelques dixièmes de µg.L-1 à quelques µg.L-1.

Miege et al. (2009) ont conçu une base de données afin d'évaluer l'occurrence et l'efficacité d'élimination des composés pharmaceutiques et cosmétiques dans les stations d'épuration. Ils ont répertorié 6 641 données concernant 184 composés, issues de 117 publications scientifiques. L'exploitation de ces données a permis, d'une part, d'identifier les composés les plus étudiés et, d'autre part, de déterminer des valeurs étayées :

  • de fréquences de quantification ;
  • de concentrations dans la phase dissoute des eaux résiduaires urbaines [eaux brutes] et des eaux épurées [effluents] ;
  • de rendements d'élimination de ces composés dans les stations d'épuration.

L'ibuprofène fait partie des produits pharmaceutiques et cosmétiques les plus recherchés dans les eaux résiduaires brutes et traitées. L'ibuprofène est donc parmi les substances les plus documentées car souvent prescrites par les médecins et donc rejetées régulièrement dans l'environnement via les stations d'épuration. L'étude de Miege et al. (2009) a mis en évidence les valeurs suivantes pour l'ibuprofène dans les stations d'épurations avec un procédé à boues activées (Tableau 8).

Tableau 8. Concentrations en ibuprofène dans les stations d'épuration avec un procédé à boues activées (Miege et al., 2009).

RSD : écart type relatif

Les concentrations des produits pharmaceutiques dans les eaux brutes dépendent essentiellement du degré de prescription et de la métabolisation par l'organisme humain. Elles peuvent également varier en fonction de la transformation des composés dans les réseaux de collecte (en amont de la station d'épuration) et de la dilution par les eaux claires parasites (pouvant atteindre 50 % dans les réseaux) selon les auteurs.

Les concentrations dans les effluents vont, quant-à-elles, dépendre principalement des concentrations dans les eaux brutes et du rendement d'élimination dans la station d'épuration (Miege et al., 2009).

On notera que l'ibuprofène fait partie des substances pharmaceutiques dont les concentrations mesurées se sont révélées les plus élevées aussi bien dans les eaux brutes que dans les effluents.

Dans les eaux marines

Les données sur la contamination de ce milieu par les substances pharmaceutiques sont relativement peu nombreuses. Un rapport du projet KNAPPE réunit des données de mesures de contamination des eaux marines côtières dans le monde (Sadezky et al., 2008). Concernant l'ibuprofène, les concentrations marines côtières reportées dans ce rapport sont les suivantes (Tableau 9 ci-après).

Tableau 9. Concentrations en ibuprofène moyennes et maximales mesurées dans les eaux marines côtières en Europe (Sadezky et al., 2008).

LD : Limite de détection

Concernant les métabolites de l'ibuprofène (1-hydroxy-ibuprofène et 2-hydroxy-ibuprofène), les concentrations moyennes en France sont inférieures à la limite de détection pour 8 échantillons avec une valeur maximale de 0,563 µg.L-1 pour le 2-hydroxy-ibuprofène.

Thomas et al. (2007) ont reporté des concentrations en ibuprofène dans les eaux marines côtières comprises entre < 0,008 et 2,370 µg.L-1 pour une concentration médiane de 0,247 µg.L-1 (concentrations mesurées dans des estuaires au Royaume-Uni) et des concentrations ne dépassant pas 0,0007 µg.L-1 en Norvège. Parmi les différentes substances pharmaceutiques étudiées, l'ibuprofène est la substance qui présente les concentrations médiane et maximale les plus élevées. Ces valeurs sont comparables à celles mesurées dans le cadre du projet KNAPPE.

Le Tableau 10 ci-après reprend de façon synthétique les différentes concentrations mesurées en ibuprofène dans les différents compartiments du milieu aquatique.

Tableau 10. Concentrations en ibuprofène mesurées dans le milieu aquatique.

n.d. : non détecté

Dans les sédiments

Lors de ce travail, nous n'avons identifié que peu de données sur les concentrations en produits pharmaceutiques dans les sédiments.

Zuccato et al. (2000) reportent des concentrations de l'ordre de 220 ng/kg dans la région de Milan.

Le BRGM a réalisé des campagnes de mesure dans le bassin Loire-Bretagne en 2006 (Togola et al., 2008). Une douzaine de points de prélèvements répartis sur le bassin ont été suivis. Ces points comprenaient des eaux de surface, des eaux côtières/estuariennes, des eaux souterraines et des sédiments. L'ibuprofène fait partie des substances pharmaceutiques étudiées lors de ces campagnes de mesure. Néanmoins, l'ibuprofène n'appartient pas au groupe de substances les plus fréquemment détectées dans cette matrice (au contraire du propanolol, un bétabloquant ou de l'acide salicylique).

Terrestre

FTE 2015 Importer

Le comportement des médicaments dans les sols et les sédiments est fonction des conditions du milieu et des propriétés physico-chimiques spécifiques à chaque médicament. Les facteurs influençant le devenir des médicaments dans ces milieux sont le pH, la température, la capacité d'échange cationique (CEC), l'humidité ainsi que les concentrations de nutriments, d'argiles, de matières organiques et de matières humiques (Boxall, 2008).

Les mécanismes généraux de migration des substances dans les sols sont la percolation, le ruissellement et le lessivage.

Dans les sols et les sédiments, l'ibuprofène est caractérisé par une faible mobilité puisque sa valeur log Koc11 est de 2,6. Une telle valeur implique que cette substance est préférentiellement adsorbée aux particules solides (colloïdes argileux, silts et matières organiques) et qu'elle est peu sujette à migrer dans le sol (Pépin, 2006), de même que dans les sédiments (Scheytt et al., 2005).

[11] Koc : coefficient de partage carbone organique-eau

Des études ont également montré que l'ibuprofène est plus propice à migrer dans les sols acides (pH inférieur à 4) que dans les sols neutres ou basiques (Oppel et al., 2004). D'après Oppel et al. (2004), l'ibuprofène est adsorbé aux particules de sol et aucunement présent dans les eaux de lixiviation pour un pH de 5,8. Les concentrations en matières organiques et en argiles influencent aussi le degré d'adsorption de l'ibuprofène aux particules de sol (Beausse, 2004).

De plus, si le produit pharmaceutique est apporté en surface du sol, avant de parvenir à la nappe, celui-ci doit s'infiltrer au travers de la zone non saturée de l'aquifère et tout d'abord au travers des horizons pédologiques. Un retard à l'infiltration ou une rétention des produits peut être alors observé. Des essais sur colonnes montrent aussi un facteur de retard12 au transfert qui est de 3 pour l'ibuprofène (Scheytt et al., 2006).

Le principal mécanisme d'élimination de l'ibuprofène dans les sols et les sédiments est la biodégradation par les microorganismes (Boxall et al., 2004 cité par Pépin, 2006). Les demi-vies de l'ibuprofène dans ces deux milieux ont été estimées par l'USEPA (2000) (cité par Pépin, 2006) à 30 et 135 jours respectivement.

Les principales sources de médicaments dans le sol et les sédiments sont considérés être les antibiotiques et les hormones de croissance qui sont utilisés dans l'agriculture plutôt qu'en médecine humaine (Stockholm County Council, 2005 ; Thiele-Bruhn, 2003).

Toutefois, lors de ce travail, nous n'avons pas identifié d'informations spécifiques sur les concentrations en ibuprofène dans les sols.

Perspectives de réduction

Réduction des rejets

LES STATIONS D'EPURATION

FTE 2015 Importer

L'élimination des résidus pharmaceutiques dans les stations d'épuration a été étudiée dans le cadre du projet KNAPPE (Buntner, 2008). L'influence de la configuration du réacteur, le temps de séjour des boues (SRT), le temps de séjour hydraulique (HRT), la température (saison), les conditions redox et la concentration des substances pharmaceutiques spécifiques dans les eaux usées en entrée et sortie de stations d'épuration sont les paramètres recensés pour la comparaison des différentes technologies.

Concernant l'ibuprofène, les conclusions sont les suivantes :

  • L'ibuprofène est efficacement éliminé pour un temps de séjour dans les boues compris entre 10 et 20 jours, temps séjour comparable à ceux utilisés pour l'élimination des nutriments (cf. Figure 7a) ;
  • le temps de rétention hydraulique n'influence pas la bonne élimination de l'ibuprofène (cf. Figure 7 b) ;
  • l'ibuprofène montre un bon abattement (environ 90 %) pour la majorité des réacteurs étudiés (cf. Figure 7c) ;
  • Il y a très peu d'informations disponibles sur l'influence des conditions redox sur l'élimination des substances médicamenteuses ;
  • Il n'y a pas d'influence des conditions climatiques sur l'élimination des substances médicamenteuses ;
  • Les solutions de pré ou post-traitement telle que l'ozonation peuvent se révéler efficace (A noter que les données sont essentiellement disponibles concernant les procédés d'ozonation).

a

b

c

CASP : Conventional Activated Sludge Processes (boues actives) ; CASP-TF – Conventional Activated Sludge Processes combined with Trickling Filter (boues actives couplé à un lit bactérien), SBR – Sequencing Batch Reactor (boues actives par traitement séquentiel); MBR – Membrane Biological Reactor (bioréacteur à membrane); FBR – Fixed Bed Reactor ; Lagoon (lagunes).

Figure 7. Elimination de l'ibuprofène dans les stations d'épuration en fonction du temps de séjour des boues en jours (a), du temps de séjour hydraulique en heure (b) et du type de réacteur (c) (Buntner, 2008).

Dans le cadre du projet AMPERES, des études ont été conduites sur 21 stations d'épuration afin d'estimer la composition en substances pharmaceutiques des eaux usées et traitées. Au cours du projet, 21 stations d'épuration ont été étudiées dont 12 filières différentes. Les analyses ont porté sur 81 échantillons d'eaux dont 32 eaux usées brutes, 33 eaux traitées secondaires et 16 eaux traitées tertiaires. Cette étude a permis de comparer l'efficacité de différents procédés d'épuration sur la base des rendements d'épuration. En comparant les concentrations en entrée et en sortie de traitements secondaires (boues activées, biofiltration, bioréacteur à membrane immergées, filtres plantés de roseaux, lit bactérien), il a été mis en évidence que les procédés d'épuration secondaires permettent une « bonne » élimination des substances pharmaceutiques, sans les éliminer totalement (Soulier et al., 2011).

Concernant les traitements tertiaires, deux types ont été étudiés lors des campagnes de mesure : les traitements d'affinage (décantation rapide, filtration sur sable et lagunage tertiaire) et les traitements avancés (ozonation, filtration sur charbon actif et osmose inverse). Il a été montré que les traitements tertiaires des eaux appliquent une élimination plus poussée des substances pharmaceutiques. Cette diminution est plus importante dans le cas de traitement tertiaires avancés. Le Tableau 11 ci-dessous indique les rendements d'élimination complémentaires (%) de la filière eau par traitement tertiaire (et ne s'applique pas au traitement des boues d'épuration) (Soulier et al., 2011).

Tableau 11. Rendements d'élimination complémentaire (%) de la filière eau par traitement tertiaire (Soulier et al., 2011).

Les valeurs de concentration des substances pharmaceutiques dans les boues sont faibles, elles sont de l'ordre de la centaine de ng/g de masse sèche. Les bilans de matière montrent que le phénomène prépondérant pour les substances pharmaceutiques n'est pas l'accumulation dans les boues, mais la dégradation.

D'autre part, Miege et al. (2009) ont montré que les principaux mécanismes d'élimination des produits pharmaceutiques et cosmétiques dans les stations d'épuration sont la biodégradation (par oxydation, hydrolyse, …), la sorption sur les boues et sur les matières en suspension (MES) (par interactions hydrophobes ou électrostatiques), la filtration et l'oxydation chimique (Miege et al., 2009). Les résultats de cette étude montrent que le type de procédé d'épuration peut influencer significativement le rendement d'élimination des produits pharmaceutiques et cosmétiques. Pour les molécules testées, les rendements obtenus par décantation primaire sans addition de réactifs physico-chimiques sont faibles (inférieurs à 40 %) au regard de ceux obtenus avec des procédés biologiques pouvant dépasser 90 %. Les rendements des bioréacteurs à membranes immergées sont équivalents à ceux d'un procédé à boues activées faible charge pour plusieurs composés comme l'ibuprofène. Les rendements des lagunes naturelles semblent également comparables à ceux des procédés à boues activées faible charge. Cela peut s'expliquer par les forts temps de séjour hydraulique, un temps de séjour des boues élevé (plusieurs années) et par le phénomène de photodégradation.

Pour chaque type de procédé, Miege et al. (2009) se sont également intéressés à l'effet de concentration dans les eaux brutes sur le rendement vis-à-vis des produits pharmaceutiques et cosmétiques. Ils ont observé un rendement d'élimination plus élevé pour l'ibuprofène lorsque la concentration dans les eaux brutes est plus forte avec le procédé à boues activées faible charge. Néanmoins, l'ibuprofène fait partie des 4 molécules pour lesquelles aucune tendance ne se dégage.

Les informations collectées dans la base de données ne permettent cependant pas de conclure quand à l'influence des paramètres opératoires (temps de rétention hydraulique, temps de séjour des boues ou température au sein des réacteurs biologiques).

Un autre axe de réduction des émissions au niveau des stations d'épuration est la réduction des pertes/fuites dans les réseaux d'assainissement qui peuvent varier entre 5 et 25 % (Dulio et Morin, 2009 ; Académie de Pharmacie, 2008).

Selon le rapport de l'Académie de Pharmacie, 2008, le coût engendré par une optimisation des STEP pour l'élimination de traces de molécules indésirables est considérable et pourrait conduire à réaliser des filières technologiques proches de celles utilisées en production d'eau potable ce qui est économiquement irréaliste (Académie de Pharmacie, 2008). Un rapport de l'Agence de la Protection Environnementale (EPA) de Suède montre que des traitements supplémentaires dans les STEP doubleraient leur consommation d'énergie et augmenteraient la facture d'eau des particuliers de 10 à 100 % (Bocaly, 2010).

Dans un premier temps, les préconisations du rapport de l'Académie de Pharmacie, 2008 sont les suivantes :

  • de réaliser une collecte la plus large possible des rejets et de réduire les fuites des réseaux ;
  • de limiter les rejets liés aux déversoirs d'orage qui rejettent directement dans le milieu les eaux usées non traitées dans les cas d'orage afin de protéger la STEP ;
  • de fiabiliser et mettre aux normes européennes la totalité les unités existantes avec un système d'assurance de qualité.

Afin de réduire les volumes d'eau à traiter et de pouvoir ainsi utiliser des traitements très efficaces qui peuvent être très onéreux, une technologie (appelée NoMix) permettant la collecte séparée des urines est actuellement en cours (Programme Novaquatis14). La majorité des produits pharmaceutiques (67 % à 27 % selon Rossi, 2008, 80 à 90 % selon Montiel, 2006) est excrétée via les urines. Ainsi, cette technique permettrait de récupérer une proportion significative des médicaments consommés par la population à une concentration 100 fois plus élevée que dans les effluents d'eaux usées municipaux (Zabczynsky, 2008) et 150 à 500 fois plus élevée dans les effluents d'hôpitaux (Montiel, 2006). L'investissement dans la technologie NoMix : 900 à 1 300 euros par toilette (Rossi, 2008).

Des expériences ont été menées dans des établissements de soin pour équiper des toilettes de ce type de technologie permettant de séparer les solides des liquides afin de traiter spécifiquement et localement les urines pour ne pas rejeter les résidus dans les égouts. Mais, la balance coût/bénéfice reste à faire (Académie de Pharmacie, 2008).

[14] http://www.novaquatis.eawag.ch/index_EN

Remarquons, qu'au sein de certaines installations de potabilisation de l'eau, l'ibuprofène est efficacement éliminé par ozonation/peroxyde d'oxygène avec des concentrations de 3,7 mg. L-1 d'ozone et de 1,4 mg. L-1 de peroxyde d'oxygène (Zwiener et Frimmel, 2000). Une dégradation satisfaisante est obtenue lorsque la concentration d'ozone est égale à la valeur de DCO (demande chimique en oxygène) de l'eau de la rivière étudiée. Huber et al. (2003) ont comparé l'efficacité de l'ozonation avec et sans peroxyde d'oxygène : la combinaison O3/H2O2 augmente l'élimination de l'ibuprofène d'environ 40%.

Toutefois, il est nécessaire :

  • de considérer que le contact avec l'ozone ou le chlore peut induire la production de sous-produits ou de métabolites de dégradation auxquels il convient de prêter attention pour en évaluer les effets biologiques potentiels (Académie de Pharmacie, 2008) ;
  • de garder en mémoire que ces techniques à coût abordable pour la potabilisation de l'eau n'ont pas été étudiées du point de vue de leur faisabilité en tant que procédés de réduction des émissions.

RECOMMANDATIONS & MESURES DE PREVENTION

FTE 2015 Importer

  • Académie nationale de Pharmacie (Académie de Pharmacie, 2008)

Les recommandations de l'Académie nationale de Pharmacie se regroupent en trois axes :

  • Limiter et contrôler les rejets (optimisation de la fabrication, amélioration des traitements de rejets ponctuels, optimisation de l'efficacité des stations d'épuration) ;
  • Evaluer les risques liés aux rejets ;
  • Développer des actions de formation et d'éducation (sensibilisation des étudiants qui se destinent à la chimie pharmaceutique et aux professions de la santé, éviter par principe toute surconsommation de substances médicamenteuse et développer le rôle des pharmaciens dans la sensibilisation et l'éduction thérapeutique et environnementale du public).

Afin de limiter les rejets, en particulier pour les industries chimiques et pharmaceutiques, l'Académie Nationale de Pharmacie propose les mesures de prévention suivantes :

  • Utilisation de techniques physiques telles que l'osmose inverse, la nano-filtration ou l'adsorption sur charbon actif, méthodes efficaces mais très couteuses pour les eaux usées ;
  • Traitement des concentras obtenus, limitant ainsi les transferts vers l'environnement ;
  • Mise en place de traitements complémentaires tels que l'ozonation si nécessaires tels que l'ozonation sont parfois nécessaires. Néanmoins, ce traitement d'ozonation/peroxyde d'oxygène est susceptible de former des sous-produits nocifs pour l'homme.
  • AQUAREF (Dulio et Morin, 2009)

En ce qui concerne les mesures de prévention, les consommateurs devraient être sensibilisés sur le fait qu'ils peuvent contribuer directement à la protection de l'environnement en évitant de rejeter dans le réseau d'assainissement ou les déchets municipaux, les produits pharmaceutiques expirés ou non utilisés.

Des réseaux de récupération sont actuellement en place dans environ 20 pays européens pour permettre la récolte des produits expirés ou non utilisés et ainsi éviter qu'ils soient rejetés, mélangés aux autres déchets urbains.

OIEau (Bocaly, 2010)

Dans son rapport, Bocaly (2010) propose également que les rejets hospitaliers soient traités sur place pour limiter les rejets dans les eaux usées municipales, et par la suite dans l'environnement, des grandes quantités de substances qu'ils contiennent.

  • Modèle suédois (Janusinfo, 2011)

http://www.janusinfo.se/ Un classement des substances pharmaceutiques en fonction du risque environnemental qu'elles présentent et un système d'information sur ce classement ont été réalisés en Suède. Ce système, qualifié en Europe de « modèle suédois », permet de choisir le composé présentant le plus faible risque pour l'environnement lorsque plusieurs composés de même efficacité peuvent être utilisés. Les informations résultant de ce schéma sont fournies aux médecins et aux patients et sont disponibles sur un site internet (). Les critères de classification sont basés sur le risque environnemental (rapport PEC15/PNEC16) ainsi que le danger pour l'environnement : PBT index (persistance, bioaccumulation et toxicité).

  • Programme KNAPPE (Zabczynsky, 2008)

Différentes stratégies de réduction des produits pharmaceutiques dans l'environnement ont été proposées dans le cadre du programme KNAPPE. Celles-ci sont présentées sur la Figure 8 ci-après.

[15] PEC : Concentration Environnementale prévisible

[16] PNEC : Concentration Prédite Sans Effet -concentration d'une substance chimique au-dessous de laquelle il ne devrait pas y avoir d'effets nocifs sur les organismes des écosystèmes considérés (Annexe I du règlement REACH)

Figure 8. stratégies de réduction des substances pharmaceutiques dans l'environnement (programme KNAPPE, Zabczynsky, 2008).

Kampa et Vidaurre (2008) ont identifié les outils possibles pour réduire les substances pharmaceutiques dans l'environnement (outils techniques, économiques…). Une des propositions serait de soutenir l'achat de substances « vertes » par les consommateurs et par le biais par exemple d'une subvention couvrant les différences de prix entre les médicaments « verts » et leurs homologues plus « dangereux » pour l'environnement (mise en place d'un ecolabel visant entre autre les processus de production).

Ils proposent également de convaincre les hôpitaux d'ajouter le profil environnemental parmi leurs critères de choix des médicaments lors des achats.

  • Plan national pour limiter les résidus médicamenteux dans l'eau (Ministères de l'Ecologie et de la Santé, 2011)

Le 30 mai 2011, un Plan national sur les résidus de médicaments dans l'eau a été lancé en France. Ce plan est structuré en une action transversale (prioriser les différentes molécules et métabolites pour lesquels les travaux doivent être engagés) ainsi qu'en 3 grands axes :

  • Axe A : évaluation des risques environnementaux et sanitaires (renforcement de la connaissance de l'état des milieux, amélioration des connaissances sur l'exposition aux résidus de médicaments et ses effets sur l'environnement et la santé) ;
  • Axe B : gestion des risques environnementaux et sanitaires (mise en place d'un dispositif de surveillance, réduction des émissions dans l'environnement, former les professionnels et informer le grand public et les professionnels, plan de communication sur les résidus de médicaments dans les eaux) ;
  • Axe C : renforcer et structurer les actions de recherche (lancement d'études économiques et sociales pour mesurer l'acceptabilité du risque et renforcement et structuration des actions de recherche).

Concernant la réduction des émissions, les ateliers de travail sont les suivants :

  • Amélioration de l'évaluation réglementaire de l'impact environnemental des médicaments ;
  • Développement de la surveillance ciblée des différents rejets potentiels de substances médicamenteuses (définition de valeurs limites d'émission) ;
  • Analyse de la faisabilité de mesures de réduction à la source des rejets médicamenteux (limitation de leur dispersion) ;
  • Analyse de la pertinence d'améliorer les traitements des eaux usées et potables (appréciation du coût-efficacité et évaluation des sous-produits générés).

On notera que dans ce cadre, une méthode d'évaluation des risques sanitaires est attendue pour fin 201117 . Cette méthode sera proposée par l'AFSSAPS et l'ANSES et sera appliquée notamment à la carbamazépine puis aux autres molécules identifiées lors de la campagne nationale (Anses, 2011).

Divers

Kümmerer (2009) présente dans une partie de son article, un état de l'art en matière de gestion du risque concernant les substances pharmaceutiques. Actuellement, il existe trois axes stratégiques pour réduire la présence de ces substances dans l'environnement :

  • une approche technique (traitements avancés) pour une gestion du risque à court et moyen terme ;
  • l'éducation, la formation et l'information (médecins, infirmières, patients…) pour une gestion à moyen terme ;
  • le développement de la chimie « verte » (pour la substitution des composés « dangereux ») pour une gestion à long terme.

Concernant l'approche technique, une des propositions actuelles est de séparer les effluents des hôpitaux des eaux usées urbaines. Néanmoins, cet auteur se demande si cette solution est pertinente du point de vue économique et environnemental étant donné que la contribution totale des hôpitaux à la charge totale des effluents d'une station d'épuration urbaine est de moins de 10 % pour la majorité des substances et même très fréquemment inférieure à 3 %. L'auteur dresse également un bilan des carences des technologies avancées actuellement proposées pour le traitement des substances pharmaceutiques (telles que les process d'oxydation, la filtration, le charbon actif …) dont les suivantes :

  • l'efficacité dépend du type de substance ;
  • aucune des technologies ne peut éliminer tous les composés pharmaceutiques ;
  • certains produits de la réaction des processus d' (photo)oxydation présentent des propriétés mutagènes et toxiques….

[17] http://www.actu-environnement.com/ae/news/pollution-eaux-rivieres-medicaments-pnrm-13189.php4

A Bellecombe, en Haute-Savoie, un nouveau centre hospitalier ouvrira ses portes au public en 2012. Localisé à proximité de la station d'épuration de la ville, le site pilote de Bellecombe (Sipibel) constitue un lieu d'expérimentation unique pour mesurer, en les comparant avec les rejets urbains, si les rejets hospitaliers présentent un risque en termes de résidus. Une première campagne de mesure a eu lieu en février 2011 et une seconde se déroulera en décembre 2011. Les résultats de ces mesures permettront d'établir un état des lieux précis de la qualité de l'eau avant la mise en service de l'hôpital. Une période de trois ans permettra ensuite de conduire des analyses et essais de traitement, la finalité du projet étant d'apporter un éclairage sur l'impact des rejets hospitaliers et sur l'intérêt d'un traitement spécifique avant la station d'épuration, afin de minimiser les rejets dans le milieu naturel (Agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse, 2011 et Actu-Environnement, 2011).

http://www.start-project.de/index.htm L'Allemagne a également mis à disposition un guide pratique : Les moyens d'intervention pour réduire la pollution de l'eau : principes actifs de médicaments pour l'homme. Ce guide est disponible sur internet : (Start Project, 2009).

Conclusion

FTE 2015 Importer

L'ibuprofène est un médicament appartenant à la classe des anti-inflammatoires non-stéroïdien. En France, son usage est principalement à destination humaine (peu d'usage vétérinaire).

Depuis une quinzaine d'années, les techniques analytiques se sont suffisamment améliorées pour permettre de quantifier la présence des médicaments dans l'environnement. L'ibuprofène fait partie des substances pharmaceutiques couramment prescrites, étudiées et rencontrées dans l'environnement. Les émissions d'ibuprofène se font principalement vers le milieu aquatique via les rejets en stations d'épuration urbaines et sont le résultat de l'utilisation par le patient.

Afin de réduire les émissions d'ibuprofène dans l'environnement et de manière plus générale les substances médicamenteuses, dont les risques pour l'homme et l'environnement sont encore incertains, des préconisations ont été proposées ou mises en place. Celles-ci se déclinent sur 3 grands axes :

  • Un axe technique avec l'utilisation des traitements des eaux avancés et une réduction des pertes par les réseaux d'assainissement ;
  • Un axe éducatif et informatif auprès des professionnels de la santé et des patients ;
  • Un axe de développement de la pharmacie « écologique » ou chimie « verte ».

Bibliographie

Documents

PDF
51146-55-5 -- 2-hydroxy-ibuprofene -- FTE
Publié le 28/06/2012